par Olivier Muller

 

Le mois de mai 1940 restera, pour notre commune, la période la plus malheureuse depuis la guerre de trente ans. Contrairement à celle-ci, elle ne fut pas meurtrière, la population étant évacuée, mais matériellement désastreuse : villages bombardés, maisons détruites, champs et prés ravagés.

Après la déclaration de la guerre, le 3 septembre 1939, l’armée française lança une offensive en territoire sarrois, puis se replia quelques semaines plus tard. La zone de Forbach abandonnée le 10 novembre pour la conduite d’une bataille défensive, amène les avant-postes sur les hauteurs entre Rosselle et Sarre dont l’implantation traverse notre commune. Le dispositif, composé d’un échelon de surveillance et d’une ligne de résistance avec blocs bétonnés, abris maçonnés et tranchées clayonnées, apparaît clairement dans nos forêts encore aujourd’hui.

L’hiver, très rude, passe sans activité notoire, perturbée seulement par les coups de main des corps francs à la recherche de renseignements, les deux adversaires se neutralisant réciproquement en évitant le combat : la drôle de guerre.

Cette passivité s’arrête le dimanche de Pentecôte 12 mai 1940. La Wehrmacht attaque violemment. Localement, la 258ème I.D. allemande affronte la 11ème D.I. française surnommée « division du fer » pour ses mérites passés.

Au petit jour, vers 3h30, l’artillerie adverse ouvre le feu en étendant son action par un bombardement massif et précis. Les villages de l’avant s’embrasent peu à peu. Dès 4h30, Morsbach, Gaubiving, Bousbach et Kerbach flambent. Les tirs s’allongent ensuite vers le Hérapel, Folkling et Tenteling. Après cette intense préparation, l’infanterie monte à l’assaut à 4h07, comme prévu par le plan « Fackel », puis s’infiltre entre les postes de surveillance français. Les deux adversaires sont au contact.

Vers 8 h, la perte des points d’appui du Heidenberg et d’Oeting favorise la conquête de Gaubiving que l’ennemi occupe bientôt dans son entier. Un peu plus tard, la section de l’adjudant Lorfentant, encerclée à la hutte de Remsing (ferme EHRHARDT), sommée de se rendre, se défend de toutes ses armes puis, rompant le cercle, retraite avec hommes et matériel. Vers 11h, l’assaillant, depuis Gaubiving, tente de rompre la résistance française aux abords des Grosswald et Spitzwald, sans résultats.

Dans l’après-midi, en revanche, la lutte, dure et difficile, se poursuit à Morsbach. Le village tombe au troisième assaut après un combat de rue meurtrier. Tombe aussi le point fortifié sur le versant ouest du Hunnenberg, pris au lance-flammes.

Par la suite, vers 18 h, l’intensité des canonnades et fusillades ralentit. En fin de journée, appuyée par l’artillerie et flanquée de chars, l’offensive pour la reconquête de Gaubiving échoua. Malheureusement, le bombardement, français cette fois ci, aggrava les destructions du village précédemment subies.

Finalement, au niveau de la commune, la ligne de défense allemande du soir épousa l’échelon de surveillance français du matin, la ligne de résistance demeurant intacte. Gaubiving et Remsing restent définitivement aux mains de l’ennemi.

Ordinairement, fête du village et pèlerinage de Saint Valentin, le lundi de Pentecôte, frise l’horreur et l’effroi sur la terre de nos ancêtres.

Au matin, sensiblement à la même heure que la veille, l’artillerie allemande déclenche un violent bombardement sur la ligne de résistance, alors que la française pilonne les anciens avant-postes perdus et leurs voies d’accès.

Nos deux villages en subissent les conséquences calamiteuses.  A 10h30, les tirs, dont le rythme avait à peine ralenti, redoublent d’intensité sur Cocheren, Folkling et Théding. L’opération est renouvelée à 21 h.

Les bombardements préparaient, chaque fois, des assauts d’infanterie centrés sur les pentes nord du Hérapel en face de Rosbrück. L’arrêt de ces tentatives devant les barbelés empêcha toute évolution du front qui resta en l’état malgré les agitations et bombardements de la nuit.

Le lendemain, après une nouvelle attaque du Hérapel, sans succès, l’assaillant temporise. Les bombardements s’espacent. La dynamique s’apaise puis s’arrête des deux côtés. Le front s’endort peu à peu.

Mais les évènements du nord de la France s’accélèrent. Ils demandent des renforts. Des prélèvements sont ordonnés. Le 17 mai, la 11ème division quitte la commune, relevée par la 47ème. Par la suite, les éléments avancés sont retirés à leur tour. Dans la nuit du 25 au 26 mai, l’échelon de couverture décroche suivi des éléments de contact.

L’opération entraîne de nombreuses destructions d’obstacles pour freiner et retarder l’avance ennemie. C’est probablement au petit jour que le pont au centre de Folkling sauta, mis à feu pour un détachement retardataire. Le souffle de l’explosion ébranla toutes les maisons alentour produisant un cratère énorme dans la rue.

Le 27 mai, le contact est rompu, mais l’occupation du terrain abandonné tarde, subordonnée au déminage des chemins d’accès. Malgré toutes les précautions, la 258ème I.D. allemande déplora la mort d’un colonel et d’un commandant mortellement blessés à Remsing.

La retraite des unités françaises déplaça le front devant la ligne Maginot aquatique. Après  deux semaines de combat, le patrimoine communal, occupé dans un état lamentable et pitoyable, attend désormais, tristement, la fin des hostilités et le retour des réfugiés.

Pour illustrer les dommages de guerre : photo de l’exposition du 20 juin 2010